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Un chien, des humains et un fait divers

durée 10h27
15 avril 2016
Patrick Richard
duréeTemps de lecture 3 minutes
Par
Patrick Richard

Pas plus tard que tantôt, après-hier comme dirait ma fille, je suis tombé sur une vidéo (vous savez, ces milliards de vidéos qui pullulent sur les réseaux sociaux) partagée par quelqu’un avec la mention lollllll. Ce mot devrait d’ailleurs faire son entrée dans le Gros Roger sous peu tant il est utilisé à toutes les patates sauces par une génération qui devrait bientôt le conjuguer (je lole, tu loles, nous lolons, vous lolez, etc.).

La vidéo (vous irez voir, je ne vous donne pas le lien, on ne se connait presque pas) met en scène une course de chiens avec obstacles devant un public dont je mets toujours en doute le degré d’intérêt (le parcours d’un chien versus le parcours d’un autre chien, est-ce si enlevant? Mais ne jugeons pas l’autrui, nous avons tous nos jardins de passion secrète, le mien concerne un peu le mini-putt, beaucoup les mauvais vinyles et énormément les boîtes de céréales). Le chien suivait les directions de son maître qui courait un peu partout pour indiquer à pitou par où passer (comme les parenthèses sont populaires dans ce texte, en voici une autre). Vers la fin du parcours, le chien trottait à vive allure et tout juste avant un obstacle, il s’est arrêté net pour se positionner comme se place un chien qui fait ses besoins. Là, devant public, sur la piste à obstacles. Le maître qui se prend la tête entre les mains, les organisateurs qui accourent avec un petit sac, le chien qui fait son petit caca, fin de la vidéo. Relolllll. J’avoue, j’ai un peu ri. Mais aussitôt, je me suis demandé : et si c’était le maitre plutôt que le chien qui avait agi ainsi, que ce serait-il passé? On ne voit plus ça, nous êtres humains civilisés que nous sommes, des choses comme celle-là (un jour, lorsque nous serons intimes, je vous parlerai de ces Indiens accroupis au-dessus des rails de chemin de fer dans divers états de l’Inde et effectuant ce que nous faisons tous en privé dedans nos salles de bains cossues). Il n’y a pas si longtemps, ne l’oublions pas, les gens étaient convoqués sur la place publique pour voir leurs compatriotes se faire décapiter. On ne versait pas tant dans la médiation culturelle à cette époque que dans le prêche exemplaire aussi fort cet exemple était-il (ne jugeons pas le passé avec nos yeux du présent, disait le philosophe Doug Risebrough). Nous nous croyons civilisés, gens du XXIe siècle, nous nous voyons tout en haut de l’échelle de la vie même si nous avons cassé tous les barreaux en montant dans cette échelle. Et là, tout en haut, nous regardons le monde qui nous appartient. Nous le menons, nous sommes beaux et intelligents. 

Pourtant, nous avons la preuve que l’intelligence n’est pas l’apanage de l’humain. Nous pouvons le constater en faisant état de gestes sensés de la part d’animaux ou insensés de la part d’humains. Qui ne se souvient pas du gars qui est mort en s’enfermant dans son congélateur (le premier à l’avoir fait serait un habitant de Strasbourg en septembre 1983, sans farce) ou d’Armando Piazza qui est resté bloqué 10 jours dans un ascenseur ou encore du gardien de but qui a gardé les buts alors que la partie était terminée depuis 15 minutes? Quoi? Vous ne connaissez pas l’histoire du gardien de but de Stocksbridge? Je vous la donne dans le mille et après ça je vous laisse, j’ai de quoi sur le feu et deux petits sur les bras. C’est Martin Monestier, grand amateur de faits divers, qui rappelle l’histoire dans son encyclopédie des faits divers. Il aime les faits divers, j’aime les faits divers, nous aimons les faits divers : « Le journal britannique The Daily Star rapporte, en février 2003, que le gardien de but de l’équipe de Stocksbridge en Grande-Bretagne a poursuivi seul un match de football terminé depuis un bon quart d’heure. En raison d’un brouillard intense, l’homme, qui ne pouvait pas voir au-delà de son point de penalty, était persuadé que la rencontre se poursuivait à l’autre extrémité du terrain. Il serait resté à son poste plus longtemps encore si un partisan n’était descendu sur le terrain le prévenir que ses coéquipiers et adversaires étaient sous la douche. » Je ne sais pas pour vous, mais moi, c’est tout ce qu’il me faut pour faire une journée. Ça et un chien qui se laisse aller en pleine course canine. Soyez intelligent et ne lisez plus ce texte. 

Patrick Richard
[email protected]

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