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Environ une demi-tonne de déchets plastiques retirés de l'estuaire du Saint-Laurent

durée 04h30
18 juillet 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Les îles de l'estuaire du fleuve Saint-Laurent ne regorgent pas seulement d'un écosystème riche en faune et en flore. Leurs berges recèlent aussi une importante pollution plastique.

C'est l'un des constats qui ressort d'une expédition conclue récemment par une équipe de scientifiques, écrivaines et photographes. Un total d'environ 500 kilos de déchets ont été amassés sur les côtes de petites îles entre Québec et Rimouski, des secteurs habituellement assez limités à la présence humaine.

Parmi les détritus récoltés, il y a de la styromousse, des bouteilles de plastique, des fragments de plastique, du papier d'emballage, des applicateurs tampons, des bouchons, des cartouches de fusil, des souliers, des sandales, des semelles et des pneus, énumère la co-cheffe de la mission Expédition bleue et biologiste marine, Anne-Marie Asselin.

«On parle en termes de volume de la plus grande quantité qu'on a jamais ramassée lors des Expéditions bleues», dit en entrevue Mme Asselin, qui est aussi directrice générale de l'Organisation bleue.

Après avoir documenté la pollution plastique dans le golfe du Saint-Laurent et ses rivages, ainsi que dans le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent et le fjord du Saguenay, l'organisation a voulu se pencher sur la situation dans des îles très peu accessibles autrement que par navire.

L'équipe a pu confirmer certaines de ses hypothèses de départ, comme retrouver plus de matières plastiques dans les îles inhabitées que sur des berges plus peuplées.

«Ça semble contre-intuitif comme hypothèse. Mais en fait, plus on va loin, moins les gens ont accès aux berges et donc les matières s'accumulent par le biais des courants marins, et selon les saisons. L'hiver, les glaces amènent beaucoup de choses dans la ligne de la banquise côtière», explique Mme Asselin.

Les versants nord des îles ont également présenté une plus grande densité de déchets, alors que les populations dans cette région se situent davantage du côté sud du Saint-Laurent.

«Les versants nord sont plus exposés au Saint-Laurent avec plus de courant, plus de force aussi de vent. On a trouvé effectivement plus de pollution du côté des versants nord. On a vu aussi certains types de terrains qui sont plus favorables à la rétention des matières», mentionne Mme Asselin.

La biologiste marine a aussi été frappée par le fait que des déchets étaient intégrés au paysage tellement que leur présence semblait remonter à il y a longtemps.

«Dans des refuges nationaux de faune avec des espèces en voie de disparition, on a constaté quand même énormément de plastique dans les nids d'oisillons de goélands et d'eiders», relate-t-elle.

«Rejoindre le coeur des gens»

Comme pour les deux précédentes missions, l'Expédition bleue qui a été menée du 23 juin au 9 juillet comportait un volet artistique. Des créateurs ont fait partie des 25 membres de l'équipage, qui était à 80 % féminin.

Ils ont créé du contenu numérique, des textes et des poèmes afin de «toucher le public différemment».

«Pour nous, c'est quelque chose de très important, puisque l'enjeu est assez complexe, assez négatif aussi, je pourrais dire. Ça amène une belle perspective, plus sensible, plus subjective au projet. Puis, ça nous aide à rejoindre le cœur des gens», soutient Anne-Marie Asselin.

Plusieurs des créations sont déjà disponibles sous forme de carnet de bord sur le site de l'Organisation bleue.

Par ailleurs, une partie des déchets récoltés serviront tant pour un travail scientifique que pour un travail littéraire de création, précise Mme Asselin.

«Ensuite, il y aura aussi plusieurs expositions qui vont être mises en place en arts visuels pour exposer de façon artistique ces déchets-là et sensibiliser davantage la population à travers des expositions qui tournent au Québec», affirme la scientifique.

Prochaine expédition au Nord

Cette troisième mission représentait le dernier chapitre en termes d'expédition pour l'Organisation bleue dans le Saint-Laurent. Elle vise maintenant l'exploration dans deux ans de rivages plus au nord. Elle cible le Nunavik, le Nunavut, la baie James et la baie d'Hudson.

«Il n'y a aucune donnée dans ces aires-là à ce jour», indique Mme Asselin.

L'Organisation bleue, qui mène des événements de nettoyage des berges, veut aussi élargir son spectre de recherche vers l'océan Atlantique, où il y a une forte concentration de déchets plastiques.

«Le Saint-Laurent, c'est un fleuve, mais son courant s'évacue vers l'Atlantique. (...) On commence à regarder des hypothèses par rapport à quel point le Canada contribue à nourrir ce continent de plastique qui se situe littéralement entre l'Amérique du Nord et l'Europe», affirme la biologiste marine.

Face à l'ampleur de la problématique de la pollution plastique, il est important d'avoir notamment de bonnes politiques et des plans d'action, avance la scientifique.

Et individuellement, tout le monde peut essayer de faire sa part en diminuant sa consommation, en privilégiant des produits désemballés ou en se tournant vers le vrac, suggère Mme Asselin.

Elle rappelle que moins de 10 % des déchets plastiques sont recyclés au pays.

Frédéric Lacroix-Couture, La Presse Canadienne