L'avocat d'une députée libérale estime qu'annuler l'élection est «déraisonnable»


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Par La Presse Canadienne, 2025
MONTREAL — L'avocat d'une députée libérale du Québec, qui a remporté sa circonscription aux élections fédérales d'avril par une seule voix, a soutenu mardi qu'il serait injuste pour les autres électeurs d'annuler le résultat en raison d'un bulletin de vote non dépouillé.
Marc-Étienne Vien, avocat de la députée Tatiana Auguste, a déclaré lors d'une audience à Saint-Jérôme, au Québec, qu'ordonner la tenue d'une nouvelle élection serait «déraisonnable» et priverait de leur droit de vote les dizaines de milliers de personnes qui ont voté dans la circonscription de Terrebonne, au nord de Montréal.
Selon lui, annuler l'élection reviendrait à nier le droit de vote de ces 61 115 personnes.
Si un nouveau vote avait lieu, a-t-il ajouté devant la Cour supérieure, certaines des personnes qui ont voté en avril pourraient être décédées depuis ou ne pas être en mesure de voter lors d'une nouvelle élection partielle.
La Cour supérieure du Québec a accepté d'entendre l'affaire après que l'ancienne candidate du Bloc québécois, Nathalie Sinclair-Desgagné, a contesté les résultats des élections dans la circonscription. Elle a lancé cette contestation après qu'une électrice du Bloc a révélé que son bulletin de vote spécial lui avait été retourné – et non comptabilisé – en raison d'une erreur d'adresse sur l'enveloppe fournie par Élections Canada.
Mme Auguste a initialement remporté la circonscription, mais celle-ci a basculé en faveur de Mme Sinclair-Desgagné après la validation des votes. Un dépouillement judiciaire, terminé le 10 mai, a toutefois conclu que les libéraux avaient remporté la circonscription par une voix.
Les déclarations sous serment déposées dans cette affaire montrent qu'un employé électoral a découvert qu'il avait imprimé par erreur son propre code postal sur plusieurs bulletins de vote spéciaux environ trois semaines avant le jour du scrutin.
M. Vien a déclaré à la cour que le vote par correspondance comporte des risques bien connus et qu'en vertu de la loi, il n'appartient pas à Élections Canada de s'assurer que les bulletins de vote postaux arrivent aux bureaux de vote. Il a qualifié l'erreur de «banale» et a appuyé que l'erreur humaine peut arriver à n'importe qui et entraîner le non-dépôt de quelques votes pour diverses raisons.
Il a également ajouté qu'il n'était pas certain que le bulletin de vote en question ait influencé le résultat de l'élection.
Il a énoncé que trois bulletins marqués pour le Bloc québécois avaient été retrouvés dans les poubelles du bureau de vote et qu'ils avaient été inclus dans le décompte final des votes, même s'ils n'avaient pas été déposés dans l'urne par l'électeur. Il a suggéré que ces votes pourraient être écartés, car leur authenticité n'a pu être confirmée, ce qui signifie que la marge de victoire de Mme Auguste aurait dû être de quatre voix et non d'une.
L'avocat de Mme Sinclair-Desgagné, Me Stéphane Chatigny, a soulevé que la décision d'une voix correspondait à une marge de victoire de 0,000016.
Refuser le droit de vote à un électeur admissible constitue une irrégularité qui a influé sur le résultat de l'élection, a-t-il constaté, réfutant l'idée que l'erreur était banale.
Un avocat d'Élections Canada a déclaré lors de l'audience qu'il ne prendrait pas position sur la contestation de Mme Sinclair-Desgagné. Il a précisé que l'organisation reconnaissait qu'une erreur avait été commise lors de l'élection. David Baum a fait référence à une décision de la Cour suprême du Canada de 2012 qui a placé la barre très haut pour l'annulation d'élections en raison d'erreurs administratives.
La décision, a-t-il expliqué, a accordé la plus haute importance au droit de vote, mais a également conclu que les élections au Canada «ne sont pas conçues pour atteindre la perfection».
Morgan Lowrie, La Presse Canadienne