Un entrepreneur accusé au criminel lui dame le pion
Un entrepreneur en construction des Laurentides déplore que les entreprises dont les dirigeants sont accusés au criminel puissent encore arracher d’importants contrats publics.
Michel Morin est président et cofondateur des Entreprises Miabec, spécialisée dans les travaux d’aqueduc, d'égouts sanitaire et pluvial.
Il y a deux semaines, lors de l’ouverture des soumissions d’un contrat d’infrastructures municipales à la Ville de Mirabel, sa compagnie a terminé deuxième plus bas soumissionnaire conforme, tout juste derrière Constructions CJRB.
Mirabel octroyait ainsi les travaux d’une valeur de 535 000 $ à cette entreprise de Terrebonne, dont un des actionnaires principaux, Christian Blanchet, a été arrêté par l’Unité permanente anticorruption (UPAC) au printemps dernier.
Six chefs d’accusations pèsent aujourd’hui contre l’homme. On lui reproche, entre autres, d’avoir commis des actes de fraude et d’abus de confiance, notamment avec l’ex-maire de Mascouche, Richard Marcotte, ainsi que le directeur général de cette même ville.
Conscient que son homologue bénéficie de la présomption d'innocence, Michel Morin trouve regrettable que l’argent des contribuables soit accordé à des gens sur qui pèsent de telles accusations.
« Je comprend qu’il ne soit pas condamné, mais je trouve ça frustrant et fâchant. Ça fait des années que je travaille avec le vent dans la face », a indiqué l’entrepreneur de Sainte-Sophie.
Geste de vengeance?
Ce n’est pas la première fois que son entreprise et celle dirigée par Christian Blanchet se retrouvent au sein d’une même controverse.
Lors de la commission Charbonneau, le grand patron d’Excavations Panthère, André Durocher, était venu affirmer que les Entreprises Miabec avaient vu, en 2009 à Blainville, leur soumission être rejetée au profit de celle déposée par Constructions CJRB, et ce, même si elle était 3 M$ plus basse.
Michel Morin assure que cette sortie publique n’est pas une vengeance.
« Il y a eu une petite ouverture dans le public pour des petites entreprises comme la mienne au cours des dernières années. Je trouve juste dommage que nous soyons encore bloqués », a-t-il confié.
L’homme d’affaires trouve que les règles ne sont pas assez strictes et que les organismes publics devraient en faire davantage pour éviter ce genre de situations.
Aucun recours pour Mirabel
Du côté de la Ville de Mirabel, on affirme ne pouvoir rien y faire.
« La Ville pourrait être poursuivie si nous n’accordions pas le contrat au plus bas soumissionnaire conforme», a indiqué le maire Jean Bouchard.
Il soutient que la municipalité tient toujours compte du Registre des entreprises non admissibles aux contrats publics (RENA) lorsque vient le temps d’octroyer une soumission.
Mais le gouvernement pourrait agir
Pour sa part, le porte-parole du Secrétariat du Conseil du trésor, Jean Auclair, a précisé que Constructions CJRB pourrait être inscrite au RENA « si son dirigeant était déclaré coupable en vertu d’un jugement définitif ».
Cependant, indique Jean Auclair, l’UPAC et l’Autorité des marchés financiers (AMF), chargés de délivrer les autorisations de contracter avec des organismes publics, pourraient tenir compte de ces accusations lors de l'analyse d'une demande que cette entreprise déposerait.
Or, pour réaliser des travaux dans une ville comme Mirabel, de telles autorisations sont obligatoires seulement pour les contrats dont la valeur est égale ou supérieure à 5 M$.
Jean Auclair précise toutefois qu’en vertu de l’article 87 de la Loi sur l’intégrité en matière de contrats publics, le gouvernement pourrait exiger à cette entreprise de la demander pour des contrats publics en cours d’exécution qui sont sous le seuil de 5 M$.
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